Angoissée par le noir et la solitude, et surtout parce que sa chambre est aussi étroite qu’un cagibi, Joy a élu domicile dans ma chambre pendant une durée indéterminée. Assis dans mon lit, callé par un gros coussin, je griffonne une planche de mon histoire, appuyé sur une tablette à pince. Joy lit un livre qu’elle a dégotté dans ma bibliothèque et papillonne des yeux. Elle doit commencer à être fatiguée. A peine deux minutes plus tard, elle dépose le livre sur le sol à côté de son matelas et enfonce sa tête dans l’oreiller. Je dépose mon croquis sur la table de chevet ainsi que le crayon. Sans prévenir, sans même lui demander son avis, je démarre ma nouvelle histoire. J’avais l’habitude de faire ça, de réciter mes contes à haute voix pour que ce soit clair dans mon esprit. « Il était une fois, dans des temps immémoriaux, une vaste et rutilante cité s’étendant dans une vallée ensoleillée. Le roi était apprécié de tout ses sujets et, en ces temps de paix, aimait recevoir les monarques de différents royaumes. Ce roi, qu’on nommait Sylvhan le Bon, avait une fille à la peau laiteuse, aux yeux de saphir et à la chevelure d’ébène. Malheureusement, elle était éprise d’aventure et d’amis, elle se sentait bien seul dans ce grand château. Elle aimait les banquets et essayait de se lier d’amitié avec ces personnes venues de contrées qui la passionnaient. Son père, bien trop protecteur ne voulait pas que son unique fille se mette en danger au-dehors des murailles de la cité. Gardes et majordomes devaient veiller à ce qu’elle ne fuit pas… » Je m’arrête, constatant que Joy commençait à s’endormir paisiblement. Comme je l’ai fait la veille, j’éteins la veilleuse sans qu’elle ne s’en rende compte pour sombrer à mon tour dans des rêves peuplés de paysages aussi magiques que mystérieux.